Archives par mot-clé : grégoire



Non pas en nous faisant traîner hors d’ici par force – Saint Grégoire de Nazianze

Non pas en nous faisant traîner hors d’ici par force

      Dieu des hommes qui sont à toi, Père et Pilote ! Seigneur de la vie et de la mort ! Protecteur et bienfaiteur de nos âmes ! Accueille-nous au moment favorable, après avoir dirigé notre existence charnelle aussi longtemps qu’il était utile. Accueille-nous quand nous te craindrons, de façon être préparés et non pas bouleversés. Au dernier jour, que nous partions non pas en nous faisant traîner hors d’ici par force, à la manière des hommes attachés au monde et à la chair, mais en nous élançant avec ardeur vers cette vie immortelle et bienheureuse qui est dans le Christ Jésus notre Seigneur, à qui appartient la gloire pour les siècles des siècles. Amen.

      Homélie de Saint Grégoire de Nazianze pour la mort de son frère Césaire (4° siècle).



Prière à son âme – Grégoire de Nazianze (+ 390) – Père de l’Église.

Prière à son âme

256

Saint-Grégoire-de-Nazianze
Saint-Grégoire-de-Nazianze

Il est temps, ô mon âme, il est grand temps, si tu veux te connaître
toi-même, ton être ou ta destinée.
D’où tu viens, et où il te faut reposer.
Si la vie est ce que nous vivons, ou si nous attendons mieux.
Mets-toi au travail, ô mon âme, il faut purifier ta vie.

Cherche Dieu et ses mystères :
Ce qui fut avant le monde, ce que représente le monde pour toi,
D’où il vient et quelle est sa destinée.
Metz-toi au travail, ô mon âme, il faut purifier ta vie.

Comment Dieu gouverne-t-il et mène-t-il l’univers ?
Pourquoi le mouvement ici et là le repose.
Pour nous, nous sommes emportés par le courant de la vie.
Metz-toi au travail, ô mon âme, ne regarde plus que Dieu.

Ce qui fut mon orgueil, aujourd’hui est devenu ma honte.
Quel est mon lien avec la vie, quelle en est la fin ?
Eclaire mon esprit, dissipe toute erreur.
Mets-toi au travail, ô mon âme, ne succombe pas à la peine.

Grégoire de Nazianze (+ 390) – Père de l’Église.
Prières des premiers chrétiens A. HAMMAN o.f.m.



Un jour vint un étranger – S. Grégoire le Grand

      En écoutant les commandements de Dieu, [les disciples d’Emmaüs] n’ont pas été éclairés; en les pratiquant, ils ont été éclairés. Car il est écrit: Ce ne sont pas ceux qui écoutent la Loi qui sont justes devant Dieu, mais ceux qui la mettent en pratique seront sanctifiés (Rm 2, 13). Celui donc qui veut comprendre ce qu’il a entendu, qu’il se hâte d’accomplir ce qu’il a déjà pu comprendre. Le Seigneur n’a pas été reconnu pendant qu’il parlait, mais a daigné se faire reconnaître pendant le repas offert. Aimez offrir l’hospitalité, frères très chers, aimez la pratique de la charité! La Vérité [dit] elle-même: J’étais étranger et vous m’avez accueilli (Mt 25, 35).

      L’histoire est bien connue, nos anciens nous en ont transmis le récit. Un père de famille, avec toute sa maison, pratiquait le service de l’hospitalité avec beaucoup de zèle. Chaque jour, il recevait des étrangers à sa table. Un jour vint entre autres un étranger, et on le conduisit à table. Le père de famille, avec son humilité habituelle, allait lui verser de l’eau sur les mains; il se retourna pour prendre la cruche, mais soudain il ne trouva plus celui sur les mains de qui il voulait verser l’eau. Comme, en lui-même il s’étonnait de ce fait, la nuit suivante, le Seigneur lui dit en vision: « Les autres jours, tu m’as accueilli dans mes membres, hier tu m’as reçu en personne. »

S. Grégoire le Grand (+ 604) Père de l’Église



A la bonne heure – St Grégoire le Grand

      Le Royaume des cieux est comparé à un père de famille qui embauche des ouvriers pour cultiver sa vigne. Tout homme qui sous une forme quelconque et dans une mesure quelconque a bien oeuvré, avec une foi droite, a été un ouvrier de cette vigne. Ouvrier le matin, à la troisième heure, la sixième et la neuvième, tel est désigné l’antique peuple juif, qui dans ses élus, depuis le début du monde, s’est efforcé d’honorer Dieu avec une foi droite, ne cessant de travailler à cultiver sa vigne. À la onzième heure sont appelées les nations.

      Nous pouvons aussi dans les différentes heures distinguer les âges successifs d’une vie humaine. Comme un tel est amené dans son enfance à bien vivre, tel autre dans son adolescence, un autre dans sa jeunesse, un autre dans la vieillesse, un autre dans l’extrême vieillesse, des ouvriers sont appelés à la vigne aux différentes heures.

      Observez votre façon de vivre, frères, et voyez si vous êtes déjà ouvriers de Dieu. Que chacun examine ce qu’il fait, et se demande s’il travaille bien dans la vigne du Seigneur.

St. Grégoire le Grand (+604)
Père de l’Église.



« Dieu, crée pour moi un coeur pur » (Ps 51, 12) – St Grégoire de Nysse

      Si, par un effort de vie parfaite, tu nettoies les scories de ton coeur, la beauté divine brillera de nouveau en toi. C’est ce qui arrive avec un morceau de métal, lorsque la meule le débarrasse de sa rouille. Auparavant il était noirci, et maintenant il brille et rayonne au soleil. De même l’homme intérieur, ce que le Seigneur appelle « le coeur », lorsqu’on aura enlevé les taches de rouille qui altéraient et détérioraient sa beauté, retrouvera la ressemblance de son modèle (Gn 1, 27), et il sera bon. Car ce qui devient semblable à la Bonté est nécessairement bon… Et ainsi celui qui a le coeur pur devient heureux (Mt 5, 8 ) parce que, en redécouvrant sa pureté, il découvre, à travers cette image, son origine. Ceux qui voient le soleil dans un miroir, même s’ils ne fixent pas le ciel, voient le soleil dans la lumière du miroir aussi bien que s’ils regardaient directement le disque solaire. De même vous, qui êtes trop faibles pour saisir la lumière, si vous vous tournez vers la grâce de l’image placée en vous dès le commencement, vous trouvez en vous-même ce que vous recherchez. En effet, la pureté, la paix de l’âme, l’éloignement de tout mal, voilà la divinité. Si tu possèdes tout cela, tu possèdes certainement Dieu…

Saint Grégoire de Nysse (v. 335-395) Père de l’Eglise



De l’égoïsme… – St Grégoire de Nazianze

Écouter ce texte en mp3

      Vous qui êtes portés vers le luxe de la table, soustrayez quelque chose à votre ventre, donnez-le à l’esprit. Le pauvre est tout près, viens au secours de sa maladie, apporte-lui quelque chose de ce que tu as en trop. Pourquoi souffres-tu d’avoir des indigestions, et lui, d’avoir faim? d’être ivre, toi, et lui, hydropique? de lester ta satiété avec une nouvelle satiété, et lui, de chanceler sous l’effet de la maladie? Ne dédaigne pas ici-bas ton Lazare, pour qu’il ne fasse pas de toi dans l’au-delà le riche que tu sais.

St Grégoire de Nazianze (+389/390)



Laissant tout ils le suivirent

Laissant tout ils le suivirent

Écouter ce texte en mp3

Saint Grégoire le Grand commente ici l’appel des disciples et leur réponse à cet appel.

      Ces pêcheurs, qu’ont-ils abandonné à l’appel du Seigneur, et combien cela valait-il? Ils n’avaient à peu près rien. Mais en pareil cas, frères très chers, nous devons prendre en compte l’attachement du coeur plus que la valeur marchande. Il a beaucoup laissé, celui qui n’a rien gardé pour lui; il a beaucoup laissé, celui qui a tout abandonné, si peu que ce soit. Nous, bien sûr, nous sommes attachés à ce que nous avons, et par le désir cherchons ce que nous n’avons pas. Pierre et André ont donc abandonné beaucoup quand, l’un et l’autre, ils ont renoncé jusqu’au désir d’avoir.

      Nos biens extérieurs, même minimes, contentent le Seigneur. Il tient compte du coeur et non de la fortune. Il ne pèse pas scrupuleusement ce dont on lui fait offrande, mais l’amour avec lequel on agit. Car, à peser la valeur matérielle des choses, nos saints marchands ont acheté la vie éternelle avec des filets et un bateau. Le royaume de Dieu n’a pas de prix, et pourtant il coûte exactement ce qu’on possède.

S. GRÉGOIRE LE GRAND (+604).



Prière à la Mère de Dieu – Saint Grégoire de Narek

Prière à la Mère de Dieu

par saint Grégoire de Narek

Toi qui a été fortifiée et protégée par le Père très haut,
préparée et consacrée par l’Esprit Saint
qui s’est reposé sur toi,
embellie par le Fils qui habita en toi,
accueille cette prière et présente-la à Dieu.

Ainsi par toi toujours secouru et comblé de tes bienfaits,
ayant trouvé refuge et lumière près de toi,
je vivrai pour le Christ, ton Fils et Seigneur.

Sois mon avocate, demande et supplie.
Comme je crois à ton indicible pureté,
je crois au bon accueil qui est fait à ta parole.

Il en sera ainsi, ô Mère du Seigneur,
si dans ma recherche incertaine, tu m’accueilles,
ô toi toute disponible,
si dans mon agitation, tu me tranquillises,
ô toi qui es repos,
si le trouble de mes passions, tu le changes en paix,
ô Pacificatrice,
si mes amertumes, tu les adoucis,
ô toi qui es douceur,
si mes impuretés, tu les enlèves,
ô Allégresse.

Je te le demande, Mère du Très Haut Seigneur Jésus,
lui que tu as enfanté Homme et Dieu à la fois,
lui qui aujourd’hui glorifié par le Père et le Saint Esprit,
lui qui est tout et en toutes choses.

A lui soit la Gloire, dans les siècles des siècles!

Amen.

Saint Grégoire de Narek (951 – 1003)



Né de nouveau – Grégoire de Nysse (+ vers 394)

Pour la fête des lumières (Sermon prononcé en 383, P. G., 46, 580)

      Il nous faut terminer avec les témoignages de l’Écriture. Notre discours se prolongerait sans fin si nous voulions tout énumérer pour le rassembler dans un seul livre. Vous tous qui vous glorifiez du don de la nouvelle naissance et êtes fiers de votre renouvellement et de votre salut, montrez-moi après cette grâce mystique le changement opéré dans vos mœurs; laissez-moi voir dans la pureté de votre vie combien vous vous êtes améliorés. Ce qui tombe sous le sens ne change pas, la forme du corps reste la même et dans la structure de la nature visible rien ne se modifie.

      Il nous faut nécessairement une preuve pour discerner l’homme nouveau, il nous faut des signes pour distinguer le nouveau du vieil homme. Ce sont, me semble-t-il, les mouvements libres de l’âme qui s’arrache elle-même à la vie passée pour adopter un nouveau style de vie, montrant clairement à ceux qui les fréquentent le changement opéré et que le passé ne laisse pas de trace.

      Voici en quoi consiste la transformation, si vous voulez bien me suivre et aligner votre conduite à mes paroles. Avant le baptême, l’homme était intempérant, avare, voleur, injurieux, menteur, calomniateur et tout ce qui s’en suit. A présent, il lui faut être réservé, satisfait de ce qu’il possède, prêt à le partager avec les pauvres, soucieux de la vérité, respectueux de tous et avenant, en un mot il doit pratiquer tout ce qui est bien. Comme la lumière chasse les ténèbres et la blancheur la noirceur, les œuvres de la justice chassent le vieil homme. Tu vois comment Zachée par son changement de vie a étouffé le publicain en lui: il a rendu le quadruple à ceux qu’il avait lésés; il a distribué aux pauvres ce que précédemment il leur extorquait.

      Un autre publicain, l’évangéliste Matthieu, collègue de Zachée, immédiatement après son élection a déposé sa vie passée comme un masque. Paul avait été un persécuteur, il devint par grâce apôtre et porta pour le Christ, en esprit d’expiation et de pénitence les chaînes injustes que jadis il avait reçues de la Loi pour poursuivre les disciples de l’Évangile.

      Voilà comment il doit se présenter la nouvelle naissance, s’extirper l’habitude du péché, voilà comment doivent vivre les fils de Dieu, car la grâce nous fait fils de Dieu. Il nous faut donc contempler exactement les qualités de notre Créateur de manière à nous modeler sur notre Père pour devenir les fils véritables et légitimes de celui qui par grâce nous a appelés à l’adoption. Un fils dénaturé et déchu qui, dans sa conduite, trompe la noblesse de son père est un reproche vivant. Voilà pourquoi, me semble-t-il, le Seigneur dans l’Évangile en traçant notre ligne de conduite dit à ses disciples: « Faites du bien à ceux qui vous haïssent, priez pour ceux qui vous blessent et vous persécutent, afin que vous soyez les fils de votre Père céleste, qui fait lever son soleil sur les méchants comme sur les bons, et pleuvoir sur les justes comme sur les injustes » (Matthieu, 5, 44-45). Vous serez des fils, dit-il, si vous partagez la bonté du Père, en exprimant dans votre comportement et vos disposition à l’endroit de vos proches la bonté de Dieu.

      Voilà pourquoi, une fois revêtus de la dignité de fils, le démon nous assiège plus durement, car il crève de jalousie quand il voit la beauté de l’homme nouveau qui s’achemine vers la cité céleste dont il a été chassé. Il allume en vous de terribles tentations et s’efforce de vous dépouiller de votre seconde parure, comme il l’avait fait pour la première fois. Lorsque nous remarquons ses incursions, il nous faut redire la parole de l’Apôtre: « Nous tous qui avons été baptisés, nous avons été baptisés en sa mort » (Romains, 6, 3.).

      Si donc nous sommes morts, le péché est mort pour nous, il a été percé par la lance comme Phinéas dans son zèle l’avait fait pour le débauché. Va-t’en donc, misérable, tu veux dépouiller un mort qui t’avais suivi autrefois, à qui les voluptés passées avaient fait perdre le sens. Un mort n’a aucun attrait pour son corps, un mort n’est pas séduit par les richesses, un mort ne calomnie pas, un mort ne ment pas, ne dérobe pas ce qui ne lui appartient pas, ne méprise pas ceux qu’il rencontre.

      J’ai changé de style de vie. J’ai appris à mépriser le monde, à faire fi des biens terrestres et à rechercher les biens d’en-haut. Paul l’a dit: Le monde lui est crucifié, et lui au monde (Galates, 6, 14). Voilà le discours de l’âme régénérée en vérité, voilà comment s’exprime l’homme nouveau qui se souvient de la profession de foi qu’il a faite à Dieu en accueillant le mystère, où il a promis de mépriser toute peine et tout plaisir par amour pour lui.

      Voilà qui suffit pour commémorer la festivité que le cycle de l’année nous propose. Il convient de terminer notre discours par celui qui nous fait ce don pour lui apporter en échange un modeste tribut pour tant de bienfaits.

      Tu es, en vérité, Seigneur, une source sans cesse jaillissante de bonté, toi qui nous as rejetés dans ta justice et qui as eu pitié dans ta bienveillance. Tu nous as haïs et tu est réconcilié avec nous, tu nous as maudis et tu nous as bénis; tu nous as chassés du paradis et tu nous y as ramenés; tu nous as revêtus de modestes feuilles de figuier, l’habit de notre misère, et tu nous as jeté sur les épaules le manteau de parure; tu as ouvert la prison et libéré les condamnés, tu nous as aspergés d’eau pure et lavés de nos souillures. Désormais Adam n’aura plus à rougir si tu l’appelles, il n’aura plus à se cacher dans le taillis du paradis sous le poids de sa conscience. L’épée de feu ne fermera plus l’entrée du paradis pour empêcher d’entrer ceux qui s’approchent. Tout est changé en joie pour les héritiers du péché, le paradis et le ciel sont désormais ouverts à l’homme. La création terrestre et supra-terrestre autrefois divisées se sont unies dans l’amitié; nous, les hommes, nous sommes accordés avec les anges et communion dans une même connaissance de Dieu.

      Pour ces raisons, chantons à Dieu le chant d’allégresse que des lèvres inspirées ont proféré un jour:

                  Mon âme exultera à cause du Seigneur
                  car il m’a revêtu des vêtements du salut,
                  comme l’époux coiffe un turban,
                  comme la mariée se pare de ses atours. (Isaïe, 61, 10).

      Celui qui parle l’épouse est naturellement le Christ, qui est, qui était, qui sera, il est béni maintenant et dans les siècles. Amen.

Grégoire de Nysse (+ vers 394)