Bénévole : Race à préserver?

Le bénévole (activus bénévolus) est un mammifère bipède qu’on détecte surtout dans les associations. Il s’y réunit avec ses congénères. Discipliné, il répond à un signal mystérieux appelé « convocation ».

Cette espèce dévouée se rencontre également, en petits groupes, dans divers endroits, quelques fois tard le soir, l’œil hagard, le cheveu en bataille, le teint blafard, discutant ferme sur la meilleure façon d’animer une manifestation ou de trouver des recettes supplémentaires pour boucler le budget.

Le bénévole utilise énormément le téléphone. Il règle ainsi les petits problèmes quotidiens en leur consacrant une grosse partie de son temps libre.

Son ennemi héréditaire est le « yaqua » dont les origines n’ont pu, à ce jour, être définies.

Le « yaqua » mammifère bipède également, se caractérise par un cerveau réduit qui ne décrypte que deux mots : YA et KA. Cela expliquerait peut-être ou en partie son qualificatif.

Le « yaka » bien abrité dans les entrailles anonymes de la cité, attend. Il guette le moment où le bénévole commettra une erreur, un oubli. Alors, il bondit, crache un venin qui atteindra son adversaire en développant chez celui-ci une grave maladie « la lassitude ».

Les premiers symptômes de cette cruelle blessure sont rapidement visibles : absences de plus en plus fréquentes aux réunions, intérêt croissant pour son jardin, sourire attendri devant une canne à pêche et attrait de plus en plus vif pour le moelleux d’un bon fauteuil, campé devant le téléviseur.

Les bénévoles, étouffés par le découragement, risquent de disparaître. Il n’est pas impossible que dans quelques années, cette espèce ne se rencontre que dans les zoos. Comme d’autres malheureux emprisonnés, leur reproduction en souffrira.

Les « yaka » dotés d’une échine souple et d’une langue bien pendue commandées par un cerveau réduit (rappel) viendront affectueusement leur lancer cacahuètes et autres substituts, trompant ainsi leur pesant ennui.

Nostalgiques, ils se remémoreront l’époque où ils traquaient sans vergogne mais avec délectation une race d’individus serviables et désintéressés qu’on appelait alors « bénévole ».